
« Réformer les politiques agricoles pour un avenir durable en Afrique : Les réflexions du Président du ROPPA, M. Ibrahima COULIBALY »
Kigali, 17 mai 2023 – Au cours d’une session intitulée « Engagement politique et plaidoyer des Organisations paysannes (OP) » organisée par la Plateforme Panafricaine des Organisations paysannes et des Producteurs Agricoles (PAFO) dans le cadre de l’évènement gestion des connaissances du FO4ACP , le président du Réseau des Organisations Paysannes et de Producteurs de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA), M. Ibrahima Coulibaly, a souligné l’importance d’une meilleure collaboration entre les acteurs du secteur agricole et les institutions gouvernementales pour améliorer la vie des populations rurales.
« Si les politiques publiques sont bonnes en faveur du secteur rural, la vie des gens s’améliore, la pauvreté recule », a déclaré M. Coulibaly. « Mais tant que nous n’arrivons pas à trouver un bon consensus pour négocier les politiques, les mettre en œuvre, les suivre, les évaluer ensemble – nous la profession agricole, les acteurs étatiques et les bailleurs de fond – ça ne fonctionnera pas ».
Il a souligné que l’approche précédente, où les décisions étaient prises sans aucune consultation avec les agriculteurs, avait été inefficace et avait entraîné peu de progrès dans le secteur. Heureusement, cette approche a évolué avec le temps, et maintenant, le dialogue avec les agriculteurs est de plus en plus fréquent.
« Nous avons commencé à nouer un dialogue politique avec le gouvernement, ce qui était très difficile au début car la plus part des gouvernements n’était pas habitué à ce que des paysans viennent faire des propositions pour améliorer les politiques publiques », a-t-il poursuivi.
Coulibaly a relevé certaines améliorations notables, notamment l’allocation de subventions à de petites initiatives et à des organisations paysannes par certains gouvernements. Cependant, il a souligné que le défi majeur reste l’accès au financement pour les agriculteurs.
« En tant que mouvement paysan, nous sommes face à nous-mêmes. Il faut se demander si ces 10% ou 15% alloués à l’agriculture sont réellement présents et, si oui, comment ils sont utilisés efficacement pour changer la vie dans nos villages, nos exploitations agricoles, paysannes. C’est là le challenge le plus important aujourd’hui », a-t-il souligné.
Il a rappelé la politique agricole révolutionnaire de 2006 de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui reconnaissait la petite agriculture familiale comme le pilier du développement. Pourtant, il a déploré le manque de financement adéquat pour cette politique.
Coulibaly a fait valoir que le plus grand défi pour le mouvement paysan africain est de faire en sorte que l’argent public soit investi dans l’agriculture de manière à transformer la vie des paysans. « Le vrai problème reste le même, comment on fait pour que l’argent public soit investi dans l’agriculture pour changer la vie des paysans ? » a-t-il demandé.
L’implication active des paysans dans l’élaboration des politiques agricoles et le plaidoyer pour l’investissement dans l’agriculture est plus crucial que jamais. Il est essentiel de disposer d’un cadre politique solide, soutenu par des investissements significatifs, qui reconnaisse la petite agriculture familiale comme le principal moteur du développement agricole et rural.
« C’est un véritable défi de prouver que nous menons des actions concrètes, malgré la mise en place d’observatoires et de systèmes pour documenter la vie des exploitations agricoles grâce à nos propres outils de collecte d’informations », a expliqué M. Coulibaly. Il a déclaré que le mouvement paysan fait des efforts pour documenter et partager les expériences, les succès et les leçons tirées, et pour participer à un dialogue politique permanent.
« Ni la CEDEAO, ni l’Union Africaine ne parlent d’agriculture sans nous faire appel en tant que mouvement paysan, que ce soit au niveau régional ou au niveau continental », a-t-il ajouté, soulignant le rôle essentiel que les agriculteurs jouent désormais dans les débats politiques sur l’avenir de l’agriculture.
L’intervention de M. Coulibaly a mis en lumière les progrès accomplis en matière de reconnaissance des agriculteurs dans l’élaboration des politiques, mais elle a également souligné les défis persistants liés au financement, à l’investissement et à l’efficacité des dépenses publiques. Il a conclu en appelant à une action plus déterminée pour veiller à ce que l’argent public soit investi efficacement pour transformer la vie des paysans et assurer un avenir durable pour l’agriculture en Afrique.
Fatimata KONE
Chargée de communication et de gestion des connaissances
ROPPA